Depuis une vingtaine d’années, on voit aussi des tags et graffs sur des trains, très recherchés pour la visibilité qu’ils offrent d’une gare à une autre. A Nantes, « dans les années 1990, en plus de leur chargement habituel, les wagons ont commencé à ramener, sur les panneaux coulissants et les bâches, des tags et des graffs récoltés aux quatre coins du pays. J’ai alors pris conscience des possibilités de cet énorme réseau, et je suis entré dans le jeu avec mes amis proches. Cette passion pour le graffiti n’a jamais cessé de grandir, avec en parallèle, un amour fou pour le support, sa diversité, son histoire », écrit Jiem dans son livre « Outside the box », consacré à « L’art des hobos et des cheminots en Amérique du Nord ».
Comme lui, de nombreux tagueurs et graffeurs ont mesuré la possibilité de notoriété d’une ligne SNCF à une autre. Il n’est plus une gare sans son florilège de tags sauvages et de graffs le long des voies, ou un train de marchandises avec des wagons peints selon diverses techniques : si le graff est fait sous les fenêtres du train, cela s’appelle un « panel ». S’il s’agit d’un wagon peint de gauche à droite sous les fenêtres, c’est ce que l’on nomme le « end-to-end ». Et si c’est un wagon tout entier qui est recouvert, c’est le « wholecar ».
C’est ce que l’on découvre en se documentant pour essayer de comprendre cet univers qui envahit les villes, dérange, provoque rejet, dégoût ou indifférence, suscite débats et polémiques. « C’est moche, c’est sale, ça ne veut rien dire, c’est du gribouillage, y’en a partout », entend-on souvent. Et l’on mesure alors que c’est précisément le but du jeu, occuper le territoire, et que non, les tags ne sont pas un gribouillage mais une signature, un nom court, un pseudonyme, ici appelé “blaze”. Au-delà de l’adrélanine et de la haute prise de risque, “Je tague donc je suis” pourrait être la devise de ceux qui marquent les murs de cette façon.