graffiti

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Philippe Chevrinais, qui vit à Trentemoult, est dans une autre démarche artistique. Depuis 2004, cet ancien des Beaux-Arts fait partie des rares plasticiens en France à investir l’espace public en pratiquant ce que l’on appelle le « reverse graffiti » (« graffiti soustractif ») ou le « clean graffiti ». En toute simplicité autour d’un café, il explique cette technique vieille comme le monde : il s’agit d’enlever la saleté sur les murs ou autres surfaces, comme on dessine un bonhomme sur la vitre sale d’une voiture. Là, Philippe Chevrinais soumet un pochoir au karcher pour faire apparaître un personnage ou un motif sur le mur.

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Depuis les années 1980, le peintre Paul Bloas dépose lui aussi son travail à Nantes. Régulièrement, il y créé la surprise avec ses immenses peintures colorées de 2 X 3, 80 m. Des géants en papier surgissent soudain au coin des rues, sur le port, sur le quai Wilson, le quai des Antilles, le blockhaus DY10… D’autres apparaissent à Rennes, Paris et Brest, où réside l’artiste. Ces silhouettes colossales disparaissent avec le temps, les intempéries ou la main des hommes mais laissent souvent des traces dans les mémoires tant elles sont impressionnantes.

 

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Et puis sur les murs, il y a des taches, des trous, des lézardes, des zébrures, des moisissures et parmi toute cette matière vivante qui évolue avec le temps, des traces laissées par des mains anonymes. Inscriptions, dessins enfantins, gribouillis, mots ou cœurs gravés marquent la pierre, le bois, le ciment, l’écorce des arbres.

 

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Une inscription spontanée ou un dessin tracé sur un support non autorisé et non prévu à cet effet, dans la sphère publique ou privée. Tel est le premier sens du mot graffiti, dérivé du latin graphium (style, poinçon pour écrire sur la cire) qui tire son étymologie du grec graphein (qui signifie indifféremment écrire, dessiner ou peindre). Dans la langue française, le mot vient de l'italien graffito et apparaît pour la première fois en 1856 dans le livre « Graffiti de Pompéi, inscriptions et gravures tracées au stylet » de Raphaël Garucci. L’auteur relève les mots, phrases et dessins retrouvés à Pompéi, où l’on peut aujourd’hui encore lire des graffiti âgés de deux millénaires.

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« Mur, je suis surpris que tu ne te sois pas effondré sous le poids des bêtises de tous ceux qui ont écrit sur toi ! » Cette inscription retrouvée à Pompéi date de 2000 ans. Encore d’actualité, elle fait sourire et reflète aujourd’hui encore une réalité : les murs parlent et racontent parfois n’importe quoi !

Il suffit d’aller dans le centre-ville, de se promener du côté des facultés, des collèges et lycées, dans les quartiers, les usines abandonnées, sans oublier de jeter un œil dans les toilettes des bars. Les latrines du Lieu Unique sont par exemple particulièrement source d’inspiration, tant du côté des messieurs que des dames !

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Pour la petite histoire, depuis Lascaux, les hommes n’ont cessé d’écrire sur les murs. C’est particulièrement le cas des civilisations grecques et romaines qui ont laissé de nombreux signes témoignant de leurs modes de vie, croyances, centres d’intérêt. Dans leurs écrits, des auteurs de l’Antiquité (Cicéron, Aristophane, Pline…) font état de graffiti érotiques et d’inscriptions spontanées ayant la forme de « satires personnelles » ou de « poésies élogieuses. » Annonces électorales, messages de supporters aux athlètes, messages politiques, religieux, érotiques, écrits personnels…: les murs antiques en ont lu de toutes les couleurs !

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Les villes en sont pleines, les services de nettoyage sont à l’oeuvre chaque jour, des habitants se montrent exaspérés : désormais plus nombreux que les graffiti traditionnels, les tags et les graffs sont partout, sur les portes d’immeubles et de garages, les palissades, les gouttières, les poubelles, les abris bus, les boîtes aux lettres, les murs sales ou fraîchement ravalés, les panneaux de signalisation, les camions de marché…

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Dans les villes, les toits et cheminées font également partie des lieux privilégiés des tagueurs, il suffit de lever la tête pour s’en rendre compte !

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Les ponts, les bords des périphériques, les tunnels souterrains des réseaux de transports en commun et les voies ferrées sont aussi très prisés. Dans ces lieux difficiles d’accès et très dangereux, où des jeunes perdent parfois la vie, les tags et les graffs y restent plus longtemps et sont soumis à la vue d’un plus grand nombre de passants. En roulant sur une quatre voies ou en prenant le tramway d’un bout à l’autre de la ville, on en mesure l’ampleur et la portée. Derrière la vitre, c’est un tout autre paysage qui s’offre au regard, constitué de noms bizarres et de lettres qui s’étirent et se mélangent, se déchiffrent ou restent illisibles.

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Depuis une vingtaine d’années, on voit aussi des tags et graffs sur des trains, très recherchés pour la visibilité qu’ils offrent d’une gare à une autre. A Nantes, « dans les années 1990, en plus de leur chargement habituel, les wagons ont commencé à ramener, sur les panneaux coulissants et les bâches, des tags et des graffs récoltés aux quatre coins du pays. J’ai alors pris conscience des possibilités de cet énorme réseau, et je suis entré dans le jeu avec mes amis proches. Cette passion pour le graffiti n’a jamais cessé de grandir, avec en parallèle, un amour fou pour le support, sa diversité, son histoire », écrit Jiem dans son livre « Outside the box », consacré à « L’art des hobos et des cheminots en Amérique du Nord ».